- Comment guérit-on du rien ?
- Tu veux dire « de rien » surement.
- Non je parle du rien. Le rien. Le vide si tu préfères. Je ne ressens plus que du rien pour tout ce qui m’entoure. C’est bizarre, c’est comme un état second. Comme quand t’es bourré. Tu comprends ce qui se passe autour de toi mais t’es enfermé dans ton propre esprit et tu ne réagis pas comme il faudrait à la situation. Et encore, quand t’es bourré, tu réagis malgré tout, même d’une façon stupide. Tu te rends compte ? J’envie ces gens qui s’enivrent. Je me dis qu’au moins eux ressentent un minimum de sentiments et qu’ils agissent en conséquence. Mais tu vois, je suis tellement anéantie par ce « rien » que je crois que même si je buvais toute une bouteille de Jack Daniel’s, je ne ferais que m’écrouler. J’sais pas ce que j’ai. On dirait que j’ai une carapace qui ricoche le moindre sentiment. J’ai l’impression que c’est mon corps qui l’a installé. Pour me protéger. En un mois, j’ai découvert jusqu’où on pouvait souffrir. A quel point la moindre parcelle d’espoir était vitale. J’ai gouté aux larmes du premier amour en espérant qu’il soit également le dernier, j’ai l’impression d’avoir tout ressentie en accéléré. La haine, l’espoir, le plaisir, la jalousie, la souffrance et la trahison. Je ne me suis jamais sentie aussi seule, je ne me suis jamais autant faite baisée. J’ai toujours pensé que quand quelque chose n’allait pas, une autre s’arrangeait. Pour faire équilibre. Chez moi, tout s’est effondré. J’ai perdu l’homme de ma vie et quelques semaines plus tard, je me suis vue trahie par ma confidente. Baisée je te dis. Par eux deux avant qu’ils ne finissent par se baiser eux-mêmes. Je n’ai plus d’amis, pas de projets, le bac dans quelques jours et cette envie de tout foutre en l’air mais sans réagir, évidemment. Alors maintenant, il n’y a plus que du rien. Même la souffrance est partie. Elle me manque un peu. Grâce à elle, je me sentais encore vivante. Aujourd’hui, je suis un zombie. Oh, il y a bien des moments où j’ai une volonté d’avancer, de faire bouger les choses. Y’en a qui me donne des coups de fouet et j’ai l’impression que ça va finir par aller mais j’finis toujours par me retrouver seule. J’peux pas leur en vouloir, ma compagnie est exécrable. J’ai envie de me déserter moi-même parfois. Alors je te demande : comment est-ce que je peux ressentir à nouveau ? Mickaël n’est plus la solution alors où puis-je trouver cette force d’aller mieux ? J’ai tellement envie d’abandonner et en même temps je sais que c’est la solution de facilité. Pour l’instant, je fais semblant. Pour mes parents et le peu de personnes qui font encore un minimum attention à moi mais je sais que ce n’est pas ça, la solution. D’ailleurs, ça ne dure jamais longtemps. Alors, je m’en remets à toi. Dis-moi comment faire pour ne plus tomber et retrouver un semblant d’humanité ?